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Plan d'action concerté pour prévenir et contrer l'intimidation 2015-2018 - L'intimidation

ANNEXES

  1. CONSULTATIONS RÉALISÉES
  2. LISTE DES PERSONNES ET DES ORGANISATIONS AYANT DÉPOSÉ UN MÉMOIRE
  3. COMITÉ D’EXPERTS SUR LA CYBERINTIMIDATION
  4. MINISTÈRES ET ORGANISMES GOUVERNEMENTAUX MEMBRES DU COMITÉ DE TRAVAIL INTERMINISTÉRIEL SUR L’INTIMIDATION
  5. SIGLES
  6. CADRE LÉGAL
  7. GLOSSAIRE

L'INTIMIDATION

Une définition


La Loi sur l’instruction publique définit l’intimidation ainsi : « Tout comportement, parole, acte ou geste délibéré ou non à caractère répétitif, exprimé directement ou indirectement, y compris dans le cyberespace, dans un contexte caractérisé par l’inégalité des rapports de force entre les personnes concernées, ayant pour effet d’engendrer des sentiments de détresse et de léser, blesser, opprimer ou ostraciser. » (art. 13, paragr. 1.1).

Le présent plan d’action se fonde sur cette définition et vient élargir la perspective à l’ensemble des milieux de vie. Pour assurer une compréhension commune, l’orientation privilégiée est de s’attarder à décrire les situations et les comportements vécus lorsqu’on croit être devant une situation d’intimidation. Les explications et les exemples qui suivent apportent des précisions sur l’intimidation et permettent de comprendre la portée donnée au plan d’action.

Des caractéristiques et des manifestations de l'intimidation


La figure 1 présente des éléments-clés qui doivent tous être présents pour que l’on puisse conclure qu’il s’agit d’intimidation1. Il est donc nécessaire de considérer la situation sous tous ses angles : le contexte, la nature des gestes et les conséquences pour la personne ciblée. Différentes précisions figurent à la suite du schéma; elles explicitent certaines particularités de ces caractéristiques.

Figure 1 : Caractéristiques et manifestations de l'intimidation


  • Inégalité des rapports de force;
  • Geste généralement délibéré ayant pour effet de nuire ou de faire du mal;
  • Caractère répétitif*.

 

Intimidation directe ou indirecte

  • Physique
    • faire trébucher,
    • bousculer intentionnellement,
    • contraindre,
    • frapper,
    • etc.
  • Verbale
    • insulter, se moquer, ridiculiser
    • menacer,
    • faire des remarques sexistes, homophobes, transphobes ou racistes,
    • faire des remarques discriminatoires basées sur l’âge ou sur d’autres caractéristiques personnelles,
    • etc.
  • Sociale
    • propager des mensonges ou des rumeurs,
    • dénigrer, humilier,
    • regarder de manière méprisante ou menaçante,
    • isoler, exclure,
    • etc.
  • Matérielle
    • détruire,
    • vandaliser,
    • s’approprier le bien d’autrui (y compris par exemple des images dans le cyberespace),
    • etc.

L’intimidation verbale, sociale ou matérielle peut se faire par l'entremise des technologies de l'information et des communications (réseaux sociaux, messages textes, courriels, blogues, sites Web, etc.)

L’intimidation directe ou indirecte a des conséquences néfastes chez la personne ciblée pouvant affecter également les autres personnes impliquées et nuire au climat de leur environnement.


* Selon le contexte, certains gestes uniques objectivement graves peuvent aussi être associés à des actes d'intimidation sans présenter un caractère répétitif. Par exemple : voies de fait causant des lésions, voies de fait armées ou menaces de mort.

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Des précisions relatives aux caractéristiques


  • Il faudra toujours évaluer les effets des gestes chez la personne ciblée. Plusieurs gestes ne sont pas nécessairement criminels en soi, mais ont des conséquences importantes chez la personne visée (ex. : détresse, insécurité, faible estime de soi, humiliation, sentiment d’impuissance à agir, etc.) et constituent, en ce sens, de l’intimidation.

    À l’inverse, les mêmes gestes peuvent ne pas être considérés comme étant de l’intimidation si la personne ciblée ne se sent pas affectée. Cette précision n’exclut aucunement qu’une intervention soit nécessaire devant des comportements inadéquats, qu’il s’agisse ou non d’intimidation.
  • À l’égard du caractère répétitif, il importe d’apporter certaines précisions :
    • La répétition peut naître du fait que le geste se produit à plusieurs reprises sur une certaine période de temps (ex. : un élève en pousse un autre lorsqu’il se retrouve en même temps que lui aux casiers. La situation dure depuis quelques semaines).
    • La répétition peut aussi signifier que plusieurs personnes différentes font régulièrement le même geste (ex. : enlever la casquette, pousser, insulter). Même si chaque personne n’a commis le geste qu’une seule fois, la somme des gestes individuels constitue de l’intimidation.
    • Un geste unique qui atteint l’intégrité physique ou morale d’une personne requiert une intervention même s’il n’est pas répétitif.
    • La plupart des gestes uniques objectivement graves sont sanctionnés par le Code criminel et peuvent faire l’objet d’une plainte auprès des corps de police pour enquête. Le cas échéant, une dénonciation pourra être soumise au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).
  • Bien que les gestes manifestés dans une situation d’intimidation réfèrent généralement à un comportement délibéré, dans certaines situations, ils peuvent être involontaires et sans anticipation des effets sur l’autre. Ce peut être le cas de jeunes qui, par manque de maturité, ne mesurent pas bien la portée de leurs actes, ou de personnes qui présentent des troubles neurologiques associés notamment à un trouble du spectre de l’autisme, à un traumatisme craniocérébral ou encore au vieillissement qui les empêchent de mesurer objectivement la portée de leur comportement ou qui les privent de l’inhibition nécessaire pour s’abstenir de commettre certains gestes. Il faudra donc toujours prendre en compte les caractéristiques personnelles de l’auteur des gestes.
  • La caractéristique « Inégalité des rapports de force » peut s’exprimer notamment par une supériorité en nombre, une supériorité fondée sur l’âge, une plus grande force physique, un contexte d’autorité, des aptitudes différentes ou la volonté d’un des protagonistes de gagner du pouvoir aux dépens d’un autre.

La cyberintimidation


Bien que la cyberintimidation soit généralement le prolongement dans le cyberespace des relations inadéquates qui peuvent s’établir ailleurs, elle comporte des caractéristiques qui la singularisent par rapport à l’intimidation en présence physique de la personne. En effet, les comportements associés à la cyberintimidation s’inscrivent dans un environnement dans lequel les rapports à l’espace et au temps sont bouleversés. L’omniprésence des TIC, l’auditoire presque illimité, la « virtualité » des interactions, l’impression d’anonymat et la spontanéité des communications sont au nombre des éléments qui influent non seulement sur les conséquences, mais aussi sur les formes que prennent les comportements de cyberintimidation.

L’intimidation en ligne ne résulte pas systématiquement d’une intention nuisible, malveillante ou délibérée, mais peut entraîner des effets imprévisibles allant au-delà des capacités des personnes en cause à les gérer puisque, dans le cyberespace, un seul acte peut être relayé indéfiniment, démultiplié instantanément ou pérennisé, et ce, dans un environnement qui est largement public et dont l’auditoire est presque illimité.

Des exemples de situations d’intimidation


  • Un jeune garçon ne correspondant pas aux stéréotypes sexuels se fait régulièrement traiter de « fif » à la cafétéria et au gymnase par certains camarades de classe. Les autres élèves commencent à l’ignorer et il souffre de cet isolement. Il cherche tous les moyens possibles pour éviter ces lieux.
  • Dans une résidence privée pour personnes aînées, un aîné insulte de façon répétitive un autre résident. Ce dernier évite de plus en plus les aires communes pour ne plus avoir à subir ces agressions verbales.
  • Des jeunes se moquent du surpoids d’un de leurs enseignants dans une vidéo diffusée en ligne qui est relayée par un grand nombre d’internautes. L’homme en subit des conséquences qui l’affectent dans sa vie professionnelle et personnelle.
  • Une jeune fille ayant une incapacité intellectuelle se fait fréquemment prendre sa tuque, son parapluie ou ses bottes dans l’autobus. Elle pleure souvent pendant le parcours et fait des crises avant d’aller à l’école.
  • De fausses rumeurs sur le comportement sexuel d’une adolescente sont propagées à l’école et dans les médias sociaux. La jeune fille se sent humiliée. Elle ne veut plus fréquenter cette école et s’absente souvent sans autorisation.
  • À l’aréna, un entraîneur insulte et menace sans cesse un jeune arbitre pendant une partie de hockey. Certains parents emboîtent le pas et en rajoutent. Le jeune arbitre devient de plus en plus nerveux et hésitant.
  • Un jeune Noir est la cible d’insultes racistes répétées par un groupe d’élèves à l’école secondaire. Il ne sait pas comment réagir, commence à se tenir à l’écart et éprouve de la difficulté à se concentrer, ce qui a des conséquences négatives sur ses résultats scolaires et sur son bien-être.
  • Des graffitis dénigrants apparaissent régulièrement sur le casier d’une athlète homosexuelle. Elle ne se sent pas acceptée par ses coéquipières, se sent seule, ce qui la pousse à abandonner l’entraînement et la compétition.

Situations qui ne sont pas de l’intimidation


  • Une dispute entre amis.
  • Une insulte d’une personne envers une autre, mais la personne ciblée réagit et la situation rentre aussitôt dans l’ordre. La situation n’est pas non plus de l’intimidation si la personne ciblée décide de ne pas accepter ce comportement et de mettre fin à la relation d’amitié ou de camaraderie.
  • Une taquinerie où tout le monde s’amuse, y compris la personne taquinée.
  • Un automobiliste exprime son impatience en klaxonnant au feu de circulation.

L’intimidation et les phénomènes connexes


Les manifestations d’intimidation peuvent faire partie de phénomènes plus larges et sanctionnables, comme la maltraitance, la négligence, la discrimination, l’exploitation ou la violence conjugale, familiale ou sexuelle2. Par exemple :

  • L’intimidation fait souvent partie du cycle de la violence conjugale.
  • L’intimidation est parfois une composante de la maltraitance.
  • Les personnes victimes d’agression sexuelle peuvent être intimidées par leur agresseur afin qu’elles ne le dénoncent pas.
  • Lorsque les biens de la personne ciblée sont volés, vandalisés ou détruits (ex. : faire des graffitis sur le casier, la voiture ou d’autres objets personnels; briser des objets personnels), il s’agit d’un acte criminel qui pourrait aussi constituer de l’intimidation.
  • Lorsqu’une personne mineure transmet une image intime d’elle-même à son partenaire et constate ensuite que cette image circule sur les réseaux sociaux, elle peut se sentir trahie et humiliée. De plus, les personnes faisant circuler l’image, y compris la personne mineure concernée, peuvent être accusées de distribution ou de possession de pornographie juvénile ainsi que de publication non consensuelle d’une image intime (Code criminel).

L’intimidation est aussi parfois confondue avec ces phénomènes connexes. Cela dit, l’essentiel n’est pas de savoir distinguer ces problèmes. Qu’il s’agisse d’intimidation ou non, si quelqu’un subit des actes pouvant atteindre son intégrité physique ou morale, il importe d’intervenir pour soutenir cette personne et d’éviter que ce comportement se reproduise.

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Exemples de comportements qui ne sont pas de l’intimidation, mais qui sont néanmoins inappropriés


ExemplesIl s'agit plutôt de...
Une propriétaire refuse à une personne de minorité ethnoculturelle l’accès à un logement.Discrimination
Un employeur réserve les promotions aux hommes de son entreprise.Sexisme
Un participant à une fête de famille passe la soirée à faire des blagues et des commentaires désobligeants à propos des immigrants.Racisme
Une gestionnaire refuse d’embaucher une personne handicapée. Elle croit que cette personne ne sera pas productive ou qu’elle n’arrivera pas à s’intégrer dans son équipe de travail.Discrimination
Un homme exige d’avoir accès à une carte de débit du compte bancaire de sa mère âgée en prétextant devoir faire des courses pour elle. Dans les faits, il en profite pour payer certaines de ses propres factures. Cette situation limite la capacité financière de sa mère et celle-ci a donc de la difficulté à répondre à ses propres besoins.Maltraitance
Un entraîneur demande à une nageuse de son équipe de se dévêtir devant lui pour évaluer sa condition physique.Agression sexuelle
Un homme, mécontent de la conduite de sa conjointe, la frappe.Violence conjugale
Une dispute entre deux jeunes adultes dans un bar se termine en bataille.Violence (voie de fait)

Des conséquences de l'intimidation


Un certain nombre de chercheurs et de chercheuses ainsi que de spécialistes se sont intéressés aux conséquences de l’intimidation, aux facteurs de risque et aux facteurs de protection. En s’appuyant sur leurs écrits3, on peut dégager des constats qui sont résumés ici et dans la section suivante.

Les conséquences de l’intimidation peuvent varier selon l’âge et les caractéristiques de la personne qui en est victime. L’intimidation, y compris l’intimidation en ligne, peut avoir des conséquences sur la santé mentale et physique. Les personnes victimes sont susceptibles d’en subir les effets dans plusieurs aspects de leur vie et les séquelles peuvent perdurer.

Ainsi, les personnes qui vivent de l’intimidation peuvent ressentir de la peur, de l’insécurité, de l’angoisse et développer une faible estime de soi, de l’anxiété ou des symptômes de dépression pouvant aller jusqu’à avoir des idées suicidaires4. Elles peuvent aussi éprouver un niveau élevé de stress, un sentiment de culpabilité, prendre ou perdre du poids ou devenir malades. Elles peuvent vivre de l’isolement social et voir leur réputation entachée. Chez les jeunes qui subissent des gestes d’intimidation, on rapporte notamment des conséquences sur la réussite scolaire (problèmes d’apprentissage, de concentration, absentéisme, décrochage), des relations sociales problématiques et un risque de délinquance accru. L’intimidation envers les personnes aînées peut avoir des conséquences sur le plan fonctionnel, tandis que l’intimidation envers les personnes handicapées peut accroître le niveau de gravité de leurs incapacités. Aussi, les préjugés et les stéréotypes véhiculés au sujet des personnes handicapées, de même que les attitudes discriminatoires et l’intimidation qu’ils engendrent à leur égard, sont susceptibles de constituer des obstacles supplémentaires importants à leur participation sociale. Par ailleurs, les personnes victimes peuvent aussi devenir à leur tour auteures d’intimidation.

Le rapport du Comité d’experts sur la cyberintimidation fait état de conséquences propres à l’intimidation en ligne et pouvant affecter la personne qui en est victime : perte d’intimité, atteinte à la vie privée et incapacité de se défendre, l’identité de l’auteur des agressions n’étant pas toujours connue de la personne victime.

De plus, l’intimidation peut avoir un effet sur l’entourage des personnes victimes de même que sur le climat de leur environnement (famille, école, équipe sportive, centre d’hébergement, etc.). Elle n’est donc pas seulement un problème individuel, mais elle touche plus largement la communauté.

Des facteurs de risque et de protection


Les situations d’intimidation peuvent être influencées par différents facteurs de risque ou de protection. Certains facteurs sont liés à des caractéristiques individuelles alors que d’autres réfèrent à l’environnement social, à des spécificités du milieu de vie ou, plus largement, à des déterminants sociaux. Ces différents facteurs peuvent avoir une influence les uns sur les autres et leur importance varie d’une personne à l’autre, d’un milieu à l’autre et même d’une situation à l’autre.

Parmi les facteurs de protection individuels, la confiance en soi, la capacité de s’affirmer et les compétences sociales sont fréquemment citées par les chercheurs. Ces facteurs peuvent protéger de la victimisation. Ce sont aussi des outils qui permettent aux personnes de s’affirmer, de prendre leur place en société sans avoir recours à l’intimidation. À l’inverse, une faible estime de soi, le fait d’être introverti et des relations sociales difficiles sont considérés comme étant des facteurs de risque.

Les personnes qui intimident tendent notamment à avoir peu d’empathie, une pauvre estime d’elles-mêmes et de faibles habiletés sociales. Dans certaines situations, le fait d’intimider peut être encouragé par l’environnement social en procurant des avantages à l’auteur (ex. : une victoire dans un sport, une certaine reconnaissance des pairs, etc.). Dans d’autres cas, la personne qui intimide peut exprimer une certaine forme de détresse par ses gestes agressifs.

Par ailleurs, les stéréotypes et les préjugés étant souvent à la base des situations d’intimidation, les personnes qui sont perçues comme étant différentes, en raison notamment de leur origine ethnoculturelle, de leur orientation ou de leur identité sexuelle, de leur apparence (y compris leur poids), de problèmes personnels (ex. : la toxicomanie, l’itinérance ou la délinquance) ou de leur incapacité ou de l’utilisation d’un moyen pour la pallier, présentent des caractéristiques qui peuvent les rendre plus vulnérables à des situations d’intimidation.

Les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et trans (LGBT), en particulier à l’adolescence, peuvent être en situation de vulnérabilité accrue. En effet, il peut être difficile, pour ceux ou celles qui sont en questionnement ou qui n’ont pas révélé leur orientation sexuelle à leur entourage, de solliciter de l’aide lorsqu’ils ou elles sont victimes de gestes d’intimidation.

Les personnes handicapées peuvent être davantage vulnérables à subir de l’intimidation que les personnes sans incapacité, en raison de la différence qui les caractérise, et ce, qu’elles soient jeunes, adultes ou aînées, et indépendamment du milieu de vie dans lequel elles se trouvent.

Quant aux Autochtones, la subsistance des préjugés à leur égard alimente les manifestations racistes ou discriminatoires dont ils sont la cible. Les Autochtones vivant en milieu urbain ou y étant de passage semblent particulièrement exposés à de telles manifestations, lesquelles peuvent s’exprimer sous forme de gestes ou de paroles d’intimidation.

Dans tous les milieux, différents déterminants sociaux, comme le contexte socioéconomique, le contexte politique, les conditions de vie ou le réseau social peuvent entraîner des conséquences, comme l’exclusion, l’isolement, la pauvreté ou la stigmatisation. Ce sont des facteurs de risque complexes qui sous-tendent le phénomène de l’intimidation. En milieu autochtone, par exemple, le passé colonial a des conséquences importantes sur le bien-être physique et psychologique des personnes, en plus d’affecter les conditions de vie des communautés; ces facteurs sont susceptibles d’influencer la prévalence d’intimidation au sein des communautés et envers les membres de ces communautés.

En l’occurrence, bien que plusieurs déterminants sociaux dépassent largement le cadre de ce plan d’action, la prise en compte de la dynamique de socialisation dans laquelle se produisent les situations d’intimidation dans les différents milieux peut permettre de mieux comprendre les facteurs qui motivent de tels gestes et d’ajuster l’intervention en conséquence. En outre, la prévention, notamment par la promotion de rapports égalitaires et de comportements prosociaux, pourra influer positivement sur le bien-être des personnes, sur le climat de leur environnement et sur leur qualité de vie.

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PRINCIPES DIRECTEURS

Une responsabilité partagée


L’intimidation peut être présente dans les différents milieux de vie que sont la résidence, les milieux d’hébergement, les établissements scolaires, le quartier et le voisinage, le lieu de travail et tout autre endroit public. L’engagement dans la prévention et la lutte contre l’intimidation interpelle donc toutes les personnes. Qu’elles soient des pairs, des parents, des bénévoles, des intervenantes ou des intervenants ou des gestionnaires, toutes ont un rôle à jouer dans la promotion de rapports égalitaires, inclusifs et empreints de civisme, dans la prévention de l’intimidation ou encore dans l’intervention.

Le maintien ou la création de conditions favorables à l’épanouissement, au bien-être et à la sécurité des personnes est une responsabilité partagée entre les citoyennes et les citoyens, les communautés et l’État. Chaque personne doit se sentir concernée par l’intimidation, promouvoir le civisme et les rapports égalitaires, agir dès les premiers signes, dénoncer les situations d’intimidation, et ce, qu’elle soit une personne ciblée, un proche ou un témoin.

Le soutien des personnes qui ont subi de l’intimidation, en vue notamment de les outiller pour qu’elles puissent agir, de même que l’accompagnement des auteurs d’actes d’intimidation, afin qu’ils s’engagent dans une démarche de changement, constituent aussi des responsabilités partagées entre l’État, les organisations qui œuvrent dans les différents milieux et les personnes concernées. Ce faisant, la participation des différents groupes à la mise en œuvre des actions est considérée comme une condition gagnante par plusieurs acteurs. Les initiatives prévoyant la participation des groupes concernés (en particulier les jeunes) dans le choix, la planification et la mise en œuvre des interventions doivent donc être encouragées.

Une approche inclusive


Le présent plan d’action propose des mesures visant à agir auprès de l’ensemble de la population, sans cibler spécifiquement un des groupes de personnes dont la vulnérabilité à l’intimidation a été soulignée lors des différentes consultations menées préalablement. Les actions mises de l’avant ont été élaborées de manière à ce qu’elles aient une portée inclusive et qu’elles puissent ainsi s’appliquer et répondre à diverses réalités ou situations. Quel que soit le contexte ou le milieu de vie dans lequel une personne évolue, chaque individu est concerné, que la personne soit jeune, adulte ou aînée, qu’elle soit LGBT, de minorité ethnoculturelle ou racisée, qu’elle ait une incapacité motrice, intellectuelle, de la parole ou du langage, visuelle, auditive ou associée à d’autres sens, liée à un trouble du spectre de l’autisme ou à un trouble de santé mentale, quels que soient son poids, ses caractéristiques physiques ou sa condition médicale.

Quant aux Autochtones, leur statut juridique unique implique que le Gouvernement du Québec adapte ses interventions aux contextes particuliers des Premières Nations et des Inuits. C’est pourquoi le présent plan d’action démontre une préoccupation voulant que certaines mesures puissent être adaptées à leurs réalités.

Une approche positive et éducative


La nécessité d’aborder la question de l’intimidation de manière positive, c’est-à-dire par la promotion en amont de comportements bienveillants et de rapports égalitaires plutôt que par une approche répressive punitive, a été soulignée à maintes reprises dans les mémoires et lors du forum, en particulier par les chercheurs et les chercheuses, les spécialistes et les personnes intervenant sur le terrain, ainsi que par les membres du Comité d’experts sur la cyberintimidation. Le présent plan d’action mise donc sur la promotion de rapports égalitaires, respectueux et inclusifs, sur la sensibilisation et la prévention, de même que sur l’apprentissage de comportements attendus et le développement des facteurs de protection.

Aucune situation ne justifiant un acte d’intimidation, les orientations retenues à l’égard des auteurs s’appuient sur une approche éducative, sur le changement comportemental ainsi que sur la justice réparatrice, en particulier chez les jeunes, en adaptant l’intervention à l’âge et au niveau de maturité des personnes concernées.

Cette approche n’exclut pas, au besoin, le recours aux mécanismes légaux existants5.

Une approche multifactorielle et interdisciplianire


L’intimidation dépasse le simple rapport entre l’auteur et la personne intimidée. Elle est la résultante d’un ensemble de facteurs individuels et sociaux sur lesquels il est nécessaire d’agir. Une approche multifactorielle prend en compte la situation dans son ensemble. Les différentes dimensions liées aux individus concernés, bien sûr, mais aussi à l’environnement avec lequel ces personnes interagissent, sont considérées. Chaque situation étant unique, les différentes actions doivent être adaptées et menées de façon cohérente et en complémentarité, de manière notamment à renforcer les facteurs de protection et à contrer les facteurs de risque.

Des interventions complémentaires aux actions gouvernementales existantes


Les interventions pour prévenir et pour contrer l’intimidation s’inscrivent en amont et en appui à d’autres priorités d’actions gouvernementales ainsi qu’à la législation existante. En effet, les dispositions légales sont souvent transversales et protègent les citoyennes et les citoyens de diverses façons. Par ailleurs, plusieurs politiques ou plans d’action gouvernementaux en vigueur sont liés à des problématiques spécifiques qui peuvent être connexes ou apparentées au problème de l’intimidation. Les interventions planifiées dans le présent plan d’action visent par conséquent à bonifier les mesures actuelles qui contribuent à prévenir et à contrer ces types de violence.

Différentes actions directement liées à la prévention de l’intimidation et à l’intervention sont déjà menées par les milieux scolaires et le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Déjà, en avril 2008, ce ministère lançait un plan d’action triennal pour prévenir et pour traiter la violence à l’école. Les trois années de mise en œuvre du plan ont permis  : de mettre en place une structure de soutien et d’accompagnement des commissions scolaires et des écoles; d’assurer une connaissance et une compréhension commune du phénomène de la violence et des meilleures pratiques pour la prévenir et la traiter; de mobiliser les milieux dans une démarche réfléchie, structurée et concertée pour la mise en place de leur stratégie locale pour prévenir et pour traiter la violence. Les commissions scolaires et les écoles ont consacré des efforts importants à la lutte contre la violence et l’intimidation depuis le lancement du Plan d’action pour prévenir et traiter la violence à l’école 2008-2011. Ces efforts se sont accrus depuis l’adoption du projet de loi no 56, en juin 2012, lequel est venu amender la Loi sur l’instruction publique et celle sur l’enseignement privé, précisant ainsi les obligations de tous les acteurs scolaires dans la lutte contre la violence et l’intimidation. Les commissions scolaires et les établissements d’enseignement publics et privés travaillent depuis à mettre en œuvre ces nouvelles dispositions législatives, notamment en ce qui a trait à l’adoption d’un plan de lutte contre l’intimidation et la violence par chaque école.

De même, le harcèlement en milieu de travail, qui s’apparente étroitement aux caractéristiques de l’intimidation, est encadré depuis 2004. En effet, le harcèlement psychologique au travail est reconnu au Québec comme étant une pratique interdite et l’employeur visé par la Loi sur les normes du travail doit prendre les moyens raisonnables pour le prévenir et le faire cesser, le cas échéant. Par cette interdiction, le gouvernement favorise une approche préventive permettant d’assurer un climat de travail sain et respectueux pour les salariés et agit pour faire cesser le harcèlement psychologique porté à la connaissance de l’employeur.

La figure 2 illustre l’interrelation entre l’intimidation et les phénomènes connexes sur lesquels l’État québécois agit déjà et présente le positionnement du plan d’action par rapport aux actions gouvernementales existantes.

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Figure 2. Intimidation et actions gouvernementales en matière d’intimidation


Champ d’action du plan d’action concerté pour prévenir et contrer l’intimidation

  • Civisme
  • Agir avant que la situation ne se dégrade
  • Agir lorsque la situation se produit
  • Soutenir les personnes

Certaines actions gouvernementales sont directement liées à l’intimidation.

  • Violence et intimidation en milieu solaire
    • Plan d’action pour prévenir et traiter la violence
    • Stratégie de mobilisation pour lutter contre la violence et l’intimidation
  • Harcèlement psychologique
    • Lien avec l’intimidation : le harcèlement psychologique s’apparente étroitement aux caractéristiques de l’intimidation.

L’intimidation est aussi liée à des phénomènes connexes sur lesquels l’État québécois agit déjà.

  • Violence conjugale
    • Lien avec l’intimidation : le rapport de pouvoir et de domination, caractéristique de l’intimidation, fait partie intégrante du cycle de violence conjugale.
      • Politique d’intervention en matière de violence conjugale, Prévenir, dépister, contrer la violence conjugale et plan d’action
  • Agression sexuelle
    • Lien avec l’intimidation : des gestes d’intimidation tels que le chantage ou la menace peuvent être commis dans le contexte d’une agression sexuelle.
      • Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle et plan d’action
  • Délinquance
    • Lien avec l’intimidation : des gestes d’intimidation peuvent s’inscrire dans une problématique de délinquance.
  • Maltraitance
    • Lien avec l’intimidation : des gestes d’intimidation font partie de certaines situations de maltraitance.
      • Plan d’action pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées
  • Racisme, sexisme, homophobie, âgisme, situations de handicap et toute autre forme d’exclusion
    • Lien avec l’intimidation : la discrimination sous toutes ses formes est souvent à la base de situations d’intimidation.
      • Politique québécoise en matière d’immigration, de participation et d’inclusion
      • Politique gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes et plan d’action Politique québécoise de lutte contre l’homophobie et plan d’action
      • Politique À part entière et plan des engagements gouvernementaux 2015-2019 à l’égard des personnes handicapées
      • Plan d’action interministériel en itinérance
  • Exploitation
    • Lien avec l’intimidation : l’intimidation est l’un des moyens privilégiés pour exploiter une personne.
      • Plan d’action pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées.

Législation

  • Violence et la maltraitance
    • Code civil
    • Code criminel
    • Loi sur la protection de la jeunesse
    • Loi sur l’instruction publique
    • Loi sur l’enseignement privé
    • Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents
    • Loi sur l’aide aux victimes d’actes criminels
    • Loi sur le ministère de la Sécurité publique
    • Loi sur les services de santé et les services sociaux
  • Harcèlement psychologique
    • Loi sur les normes du travail
  • Discrimination et l’exploitation
    • Charte des droits et libertés de la personne
    • Charte canadienne des droits et libertés

  1. Cette figure a été élaborée dans le but d’illustrer les caractéristiques de l’intimidation pour en faciliter la compréhension. D’autres représentations sont possibles et le présent schéma pourrait être appelé à évoluer.
  2. Les phénomènes sont définis dans le glossaire, à l’annexe 7.
  3. On trouvera les références complètes des documents sur lesquels les constats s’appuient à la fin du présent document, dans la section « Principaux documents de référence ».
  4. La prudence s’impose avant d’établir un lien direct entre l’intimidation (en présence ou en ligne) et le suicide. Si les recherches arrivent fréquemment à établir des liens entre la victimisation et la dépression, l’Association québécoise pour la prévention du suicide rappelle « [...] qu’avoir des idées suicidaires peut arriver à tout le monde, mais il existe plusieurs facteurs qui peuvent ébranler une personne (facteurs prédisposant, contribuant, précipitant) ou l’aider (facteur de protection) ».
  5. Pour connaître le détail du cadre juridique, se référer à l’annexe 6.

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Dernière mise à jour :
28 septembre 2020